Dans les années 70, le programme enseigné dans le secondaire et dans les classes préparatoires réposait sur le slogan « Dieu créa l’ensemble vide et l’homme fit le reste. ». C’était un peu radical mais avait le mérite de présenter les mathématiques de manière cohérente et de montrer que l’on pouvait créer de nouveaux objets à partir d’objets déjà existants. La présentation en était malheureusement extrêmement dogmatique, et l’impression qu’on en retirait était plutôt que Dieu avait créé l’ensemble vide et la théorie des ensembles, et sur sa lancée, les entiers, les entiers relatifs, les nombres rationnels, puis les groupes, les anneaux, les corps et les espaces vectoriels, puis les nombres réels, ensuite il avait introduit des \(ε\) et des \(δ\), puis créé la topologie…, et quand il avait enfin été content du résultat, il avait fait don aux hommes d’une théorie immuable et parfaite, à la beauté froide et lisse.

Le dogme a changé vers le milieu des années 90, et on est reparti sur le mode : « Dieu a créé les nombres réels, puis les nombres complexes, et envoyé Gauss sur terre pour expliquer qu’il n’y avait pas besoin de chercher plus loin. ».

Lu dans Éléments d’analyse et d’algèbre de Pierre Colmez.

C’était le livre de référence pour le premier cours de mathématiques que j’ai suivi en France. Pendant un moment c’était donc un livre de chevet pour moi. Si vous voulez avoir plus de son style hilarant, cherchez sa lettre de départ de l’École polytechnique, elle doit encore être disponible quelque part sur le net.

C’est un très beau livre, et un des rares dont je possède un exemplaire dédicacé. En effet, à l’époque où je vivais encore au Pérou, j’avais l’habitude de demander une dedicace aux célébrités mathématiques qui passaient de temps en temps. En France j’ai assez vite arrêté de le faire.